Montagne magique

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Je reviens à Otomi, Matsue-san nous aide à repérer des endroits qu'il connait bien. On le suit, dans un paysage magnifique au milieu des rizières au riz fraichement repiqué, jusqu'à un petit pont au dessus de la rivière Ajimi où il y avait, me dit-il, plein de lucioles la semaine précédente. J'installe un appareil au bord de la rivière et un autre plus loin afin d'avoir une vue générale sur la montagne. Ce soir, il fait beaucoup plus sombre, la lune est cachée par de gros nuages. La danse des lucioles n’en est que plus belle, et plus le noir s’installe plus elles semblent des milliers à s’allumer et à s’éteindre comme la houle qui va et vient. On dirait que la  montagne respire...

 
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Amasaka

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Après une heure et demi de route vers le sud de Fukui, j’arrive à Amasaka dans la région de Wakasa. À l’âge de 30 ans, après 12 années de vie à Tokyo, Makoto Shimamitsu décide de s’y installer pour faire une riziculture sans pesticide. Au bout de quelques années, sur ses rizières, les lucioles Heike sont revenues. Il me conduit jusqu’à une parcelle où les lucioles apparaissaient encore la semaine précédente en me disant que c’est un peu la fin de la saison des lucioles. Malgré tout, je m’installe dans un angle du champ en espérant qu’elles y sont encore...

Un peu avant 20h, j’aperçois les petites lueurs sortir des herbes en bordure !

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Effectivement en fin de saison, elles ne sont pas nombreuses… La piste principale de leur danse est un peu hors-champs de mon cadrage, hélas, mais j’ai pu en capter quelques unes quand même… Il y en a aussi sur un ravin où coule un cours d’eau couvert d’herbes sauvages, alors je me décide de déplacer l’un des trois appareils pour viser ce ravin sous la lumière bleue de la lune… 

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Rêverie

 

On ne les avait pas aperçues jusque-là à cause de la taille des hautes herbes et parce que, attirées par l’eau, les lucioles qui en jaillissaient voletaient en étirant très bas leurs tracés capricieux. — Même les yeux fermés, Sachiko revoyait nettement, prolongeant jusque dans sa rêverie les trajectoires déconcertantes de leurs lueurs fantomales, les lucioles qui s’entremêlaient à l’infini, au loin, très loin, jusqu’aux limites du ruisseau et sur chacun de ses bords, leurs sillages sans nombre, alors que l’œil percevait encore confusément les longues oscillations des herbes proches, juste avant que, la nuit plus dense montant comme rampant du fossé même, ne s’établit le noir le plus profond…

Junichirô Tanizaki, Bruine de neige

 
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Danse de minuit

Sur la route du retour, je repère un petit ponton, à quelques kilomètres du village d'Ijira et je me gare sur le bord de la route étroite. À quelques mètres seulement de là, sur la rivière plongée dans le noir, une vison inouïe m'apparaît. Il est minuit passé, c'est incroyable !  Les lucioles dansent encore !

 
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Lucioles à la lune

 

水にもえ月に消え行く蛍哉
Mizu ni moe tsuki ni kieyuku hotaru nari

 

Brûlent sur l’eau
   S’éteignent à la lune
      Ah, les lucioles !

        Natsume Ginkô ( ? - 1783 )

 
Rivière Ajimi à Ijira

Rivière Ajimi à Ijira